Beaucoup de lieux d'Amsterdam portent le nom de personnes, de navires ou autres qui ont marqués son histoire, c'est donc sous cet aspect que j'aimerais la présenter.
Carte d'Amsterdam, les points montrent les lieux portant un nom empreint de son histoire
C'est le 18 mars 1522 que tout a commencé. Le bien connu Magellan souhaitait effectuer le premier tour du monde, il n'a malheureusement pas pu réaliser son rêve jusqu'au bout, il est décédé pendant cette aventure aux Philippines. Sébastien Del Cano (1 sur la carte) prendra alors sa suite aux commandes de La Victoria et sera le premier à indiquer sur une carte l'île d'Amsterdam à cette fameuse date, l’île ne porte alors aucun nom. Les conditions sont trop mauvaises pour y mettre pied et l'équipage est pressé de rentrer, la faim et le scorbut se répandant à bord. Ils rentreront en Espagne le 7 septembre 1522 après 37 mois de navigation.
La pointe Del Cano
La découverte de l'île St Paul est moins connue mais l’île est référencée assez rapidement sur une carte avec le nom de S. Paulo qui serait le nom d'un navire.
Le règne des navigateurs espagnols se termine et laisse place aux néerlandais. Ce sont eux qui nomment définitivement notre bout de caillou en 1633. Le gouverneur Van Diemen lui donne le nom de son navire le Niew Amsterdam (Nouvelle Amsterdam), c'est également le nom que la ville de New York a porté pendant un temps.
Le premier débarquement connu sur ces deux îles date de 1696. Willem De Vlaming (2) a ordre de s'y arrêter pour tenter de retrouver trace d'un navire perdu. Il s'arrête à St Paul puis Amsterdam. A cette époque le bassin du cratère de St Paul ne communiquait pas encore avec la mer, de nombreuses otaries peuplent encore les rivages de ces îles et la végétation est dense, il est très difficile de s'aventurer loin dans les terres.
Ces îles ne sont alors qu'un point de repère sur la route du commerce vers l'Indonésie, mais n'ont pas un grand intérêt.
Vers la fin du XVIIIème siècle, elles commencent à représenter un grand intérêt commercial, notamment pour la pêche, la chasse à la baleine et les fourrures d'otaries. Il y a alors un peu plus de passages et ces îles sont parfois habitées temporairement.
L'amiral Bruni d'Entrecasteaux (3) est chargé en 1791 d'une expédition à bord des navires La Recherche (4) et L'Espérance pour tenter de retrouver les navires de La Pérouse, dont on a perdu trace. Il s'arrête devant Amsterdam le 28 mars 1792 et en fait une grande description. L'île est alors en feu, cause humaine ou volcanique ? Plusieurs autres descriptions de l'île la mentionneront en feu, ce qui bouleversera en partie la végétation et la vie de ses habitants.
La pointe d'Entrecasteaux
La pointe de La Recherche
Au cours du début du XIXème siècle, les chasseurs d'otaries déciment les colonies de St Paul et Amsterdam et vont donc arrêter très rapidement cette activité qui ne sera plus rentable et laisser ainsi plus de places aux pêcheurs.
En 1814, l'île de France (Maurice) et ces dépendances deviennent anglaises, les îles St Paul et Amsterdam en font partie, malgré leur non-occupation par des Mauriciens ou des Anglais.
Adam Mieroslawski, français d'origine polonaise, souhaite installer une pêcherie sur St Paul, les pêches là-bas sont miraculeuses et le poisson se revend très bien à La Réunion ou à Maurice. Il demande donc au gouverneur de La Réunion la prise de possession de ces îles par la France afin de pouvoir continuer tranquillement ces affaires. Le gouverneur répond favorablement à cette demande, le 12 juin 1843, l'Olympe (5) appareille pour St Paul et Amsterdam afin d'y hisser le pavillon français et ainsi doubler les Anglais. Il s'agit plus d'un protectorat français que d'une prise de possession officielle.
La pêcherie dure 10 ans avant de faire définitivement faillite et le statu-quo sur la possession de ces îles entre la France et la Grande-Bretagne durera encore plusieurs dizaines d'années.
L'activité de pêche continue au large de ces îles mais avec moins d'ampleur que l'installation de Mieroslawski.
L'île d'Amsterdam a connu beaucoup moins d'habitants que St Paul pour cause d'une plus grande difficulté d'accostage. Pourtant, au début des années 1870, Heurtin (6), un colon réunionnais, tente d'y installer une ferme. C'est probablement lui qui a apporté des vaches sur l'île, vaches qui reviendront à l'état sauvage, les dernières ont été abattues il y a 2 ans.
En 1873, le Commodore Goodenough (9) à bord de La Pearl (7) s'arrête à Amterdam à la recherche d'éventuels naufragés, il fait une grande description des restes de la ferme du colon Heurtin.
Les côtes d'Amsterdam sont loin d'être sûres, plusieurs navires y font naufrage, dont Le Fernand (8), goélette de pêche, en 1876, un mois plus tard les rescapés seront récupéré par un navire.
Le mont Fernand
Au milieu du XIXème siècle, la pêche bat son plein, les derniers chasseurs d'otarie finissent d'exterminer les colonies et c'est également la période des premières expéditions scientifique. La frégate autrichienne La Novara (10) effectue un tour du monde de 1857 à 1859 à but scientifique et fait escale à St Paul et Amsterdam, afin de mener des études sur l'astronomie, la géodésie, le magnétisme, la météorologie, l'hydrographie...
En 1875, la planète Vénus (11) passe devant le Soleil, c'est une grande opportunité pour calculer la distance Terre-Soleil, plusieurs sites d'observations français, dont l'île St Paul, sont choisis par Dumas (12), président de la commission de cet événement à l'Académie des Sciences. C'est le navire La Dives (13) qui mènera les scientifiques à destination. Cet événement est aussi l'occasion de faire escale à Amsterdam afin de dresser une carte de l'intérieur de l'île qui est très peu connu à cette époque, Vélain s'en charge et donne aux lieux des noms liés à son expédition (Vénus, Dives, Dumas), Hébert (14), qui est son maître, devient alors le nom d'un cratère.
Sur le Vénus supérieur et en face le Vénus inférieur
C'est en 1893 qu'a lieu la prise de possession officielle de ces îles par la France, mais toute la première moitié du XXème siècle, ces îles ne sont que très peu fréquentées. Une dernière tentative d'installation d'usine sur St Paul a lieu autour des années 30, c'est un véritable échec, plusieurs personnes n'en reviendront pas, ce sont les oubliés de St Paul.
C'est finalement grâce à la science que ces îles vont attirer de nouveaux l'intérêt et au début grâce à la météorologie. C'est en 1950 que la première mission scientifique a lieu menée par Paul de Martin de Viviès (15), météorologue. Depuis cette date, les missions scientifiques s'enchaînent, chaque année une équipe de 20 à 30 personnes hivernent, nous en sommes à la 63ème mission. La base porte le nom du chef de la première mission depuis 1972.
Les débuts n'ont pas été faciles, il a fallu acheminé 166 tonnes de chargement sur l'île dans des conditions d'accostage difficile. Le 8 janvier 1950, lors d'une manœuvre pour apporter le matériel sur l'île, un radeau où se trouve le matelot Emile Ribault (16) chavire, l'accident sera mortel.
Les premières missions connaissent d'autres accidents aussi dramatiques, comme François Antonelli (17), météo, décédé lors d'une chute accidentelle du haut d'un pylône.
Dans le cratère Antonelli
Dans les derniers noms donnés aux lieux de l'île, on trouve Pointe Bénédicte (18), appelé plus simplement pointe B. C'est le lieu où se fait l'étude de la chimie de l'atmosphère, et où l'on prélève l'air le plus pur au monde (à ce qu'il paraît). Il s'agit d'un site privilégié pour mesurer et étudier les composés émis par l'activité humaine. Le nom de la pointe a été donné en l'honneur de Bénédicte Ardouin qui a organisé la logistique et le suivi de ce programme.
De nos jours, ces îles ont un véritable potentiel pour la recherche mais elles sont toujours un atout économique. Deux fois par an, le navire l'Austral vient y faire sa campagne de pêche, les eaux de St Paul et Amsterdam regorgent de poissons et surtout de langoustes, la meilleure au monde.
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Toutes ces informations ont été tirées du livre « Saint Paul et Amsterdam, Voyage austral dans le temps » de Yannick Verdenal qui a effectué son hivernage en 1997.
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